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Le carnaval des orgres de Philippe Villard-Mondino

Abdul Hamid, le Sultan rouge. Mehmet Talaat, le « Pacha pomak ». Artin Meguerditchian, le collaborateur qui a établi la liste des Arméniens à arrêter le 24 avril. Voilà quelques uns des sinistres personnages de ce carnaval des ogres, voraces en vies humaines.

Dans cette tourmente, Soghomon Tehlirian est le glaive de la justice.

L’histoire a déjà été traitée (Opération Nemesis, Justicier du génocide arménien, etc.), mais jamais comme dans le Carnaval. Ce récit marque un changement total d’approche en s’affranchissant de la pédagogie historique, tout en étant solidement étayé sur les faits. Sa rédaction est comme en « caméra subjective ». Les « Je » se multiplient et se diversifient. Le « Je » du sultan rouge, celui de Talaat, celui de Tehlirian. L’écriture, dense, nerveuse, fait pénétrer dans les replis cérébraux des personnages. Selon les cas, dans leurs angoisses, leur souffrance, leur folie. Le lecteur est lui-même pris dans la tourmente. Palais de Yildiz, résistance de Van, Deir ez-Zor, Boston, Berlin. Les chapitres sont courts et la prose, pressée, percutante.

Le carnaval des ogres est la première publication de la toute jeune maison d’édition lyonnaise « Les gens du blâme » qui s’annonce courageuse et exigeante.

Philippe Villard-Mondino, Le carnaval des ogres, Éditions Les gens du Blâme, 2016, 187 p., 15 €.